Tension d’approvisionnement d’une spécialité multivitaminique injectable : quels en sont les impacts ?

Dans un contexte de contingentement de l’unique spécialité MultiVitaminique (MV) injectable référencée dans l’établissement, la pharmacie à usage intérieur (PUI) a réquisitionné l’ensemble du stock des services de soins afin d’en optimiser la gestion. L’objectif de ce travail est de mesurer l’impact de cette tension d’approvisionnement sur la gestion du stock des spécialités MV injectable (MV IV) et Per Os (MV PO), l’organisation du circuit de dispensation et l’éligibilité des patients à la forme IV. Une note d’information a été rédigée par les pharmaciens, en collaboration avec les médecins de l’unité de transversale nutrition (UTN), selon les recommandations et l’algorithme décisionnel provisoire de la SFNCM, puis transmise aux services. Elle définit la prise en charge des patients nécessitant une supplémentation vitaminique en fonction du type de nutrition (artificielle ou non) et de la voie (entérale ou parentérale), ainsi que la conduite à tenir en cas d’inéligibilité au traitement. L’ensemble des prescriptions de la spécialité MV IV a été recueilli sur la période du 16 juillet (date de mise en pratique de la nouvelle organisation) au 31 août 2021, avec une analyse du type de nutrition parentérale (NP), de l’indication, de la prescription de MV ou non, de la posologie IV, de la vérification du respect des recommandations en vigueur. Des alternatives ont été proposées en cas de non-dispensation de MV IV. Les données ont été récoltées sur un tableur Excel®. Une analyse des consommations a été réalisée sur deux périodes : P1 pour la période pré contingentement des MV IV (27/05 au 12/07) et P2 du (16/07 au 31/08), afin de quantifier le coût du changement de pratique. Le prix unitaire hors taxe (PU HT) et les quantités dispensées ont été extraites du logiciel de gestion de stock PHARMA®. Sur la période P2, 90 prescriptions de MV IV ont été analysées. L’insuffisance intestinale représentait 62 % des patients sous NP exclusive. Parmi les 56 % des prescriptions avec une NP non exclusive, l’analyse pharmaceutique a conduit à un refus de dispensation dans 64 % de ces cas car les patients pouvaient avoir des apports au moins par voie entérale. Une alternative a systématiquement été proposée et acceptée dans 88 % des cas. En cas de refus, un avis de l’UTN était demandé concernant la non-dispensation de MV IV. Durant P1, 5574 MV IV et 85 MV PO sont dispensées pour un coût de 22 532€ HT. Durant P2, 1576 MV IV et 188 MV PO sont dispensées pour un coût de 7256€ HT soit une économie de 68 % des dépenses en spécialités MV (IV+PO) par rapport à P1 (15 275€ HT). Cette nouvelle organisation permet une optimisation de l’utilisation de la spécialité MV IV dans ce contexte de contingentement sans surcoût ni rupture d’approvisionnement. La continuité de la mise à disposition de cette spécialité est assurée pour les patients n’ayant pas d’alternative possible, notamment en écartant son utilisation systématique dans les perfusions de base. Le maintien de cette organisation ainsi qu’un travail sur le mésusage de la supplémentation vitaminique semble avoir un intérêt économique à long terme, pouvant être chiffré à 118 000€ par an.