La dracunculose, « la maladie du grenier vide »
2003
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LA DRACUNCULOSE, LA MALADIE DU GRENIER VIDECHAPEAU En Afrique on l’appelle « la maladie des greniers vides ». Il s’agit de la dracunculose causée par le ver de Guinée. L’éradication de cette maladie est en cours puisque elle a baissé de 98 % au cours des douze dernières années. Pourtant elle affecte encore plusieurs dizaines de milliers de personnes sur le continent et les symptômes (pustules sous la peau, douleurs, fièvre et vomissements) sont tellement invalidants qu’ils handicapent les malades pendant des mois. Cela signifie donc la plupart du temps, l’abandon des travaux agricoles, d’ou le surnom de « maladie des greniers vides ». Au Mali, les autorités ont pris le taureau par les cornes et dans la région de Bandiagara qui était particulièrement affectée, les résultats sont remarquables. Un reportage de Filifing Diakité..DURÉE DE LA BANDE 9’12 Studio : Le ver de Guinée est physiquement présent sous la peau des malades et forment des pustules extrêmement douloureuses. Alors en quoi, concrètement, la maladie peut empêcher les activités agricoles. La réponse de Garibou Bamia, responsable de terrain du Programme Ver de Guinée dans la région de Mopti.Bamia Pour un paysan vous savez, si un paysan doit cultiver, c’est qu’il doit se déplacer, il doit aller aux champs et le berger il doit aller au pâturage avec ses animaux. Alors pour quelqu’un qui contracte un cas de ver de Guinée, déjà avec l’inflammation que donne au niveau des membres inférieurs, c’est à dire le point de sortie du ver, alors donc le malade est immobilisé temporairement, c’est une immobilisation temporaire, c’est à dire une immobilisation pendant que le ver va durer au niveau du corps c’est à dire une semaine, deux semaines maximum. Donc c’est une mesure temporaire, tant que le ver ne sortira pas, alors le malade est immobilisé, il est là, il ne peut pas se déplacer. Alors pour quelqu’un qui ne peut pas se déplacer, pas question de parler de semis, de semences ou de cultures et c’est le même cas pour le berger qui se déplace avec ses animaux le long des pâturages. Diakité Alors si on faisait une sorte de comparaison, un cas de ver de Guinée dont on s’occupe et un cas de ver de Guinée dont on ne s’occupe pas, quelle peut être la durée relative de l’immobilisation ? Bamia Bon vous savez pour quelqu’un, pour un malade qui est vraiment suivi, dont le traitement est correctement fait, cela veut dire que dans les consignes et dans les stratégies de programme, le responsable doit faire le pansement correct du malade chaque trois jours et pendant qu’il fait, chaque fois qu’il fait le pansement, il doit tirer le ver quelques centimètres avant, l’enrouler au bout d’un bâtonnet et faire le bandage. Donc en faisant ce système, au bout de 4 ou 5 jours, sinon une semaine, tout le ver est sorti. Il pourra extraire le ver. Par contre chez un malade qui n’est pas suivi, qui n’est pas prix en charge par un HV, alors là subitement le malade lui même, en tentant de tirer pour l’enlever, il peut le couper et même si il ne le coupe pas, déjà le fait qu’on ne tire pas, le ver lui même, sa sortie est ralentie. Alors chaque fois que son pied est en contact avec l’eau, le ver tentera de sortir juste pour pondre ses oeufs. Sinon tant qu’il n’est pas au contact de l’eau, déjà le ver se rétracte et souvent même les bouts sont séchés. Alors ça peut prendre deux semaines même trois semaines. Diakité Donc quelqu'un duquel on s’occupe pas, ça peut durer plus longtemps que ça. Bamia Ah pour quelqu’un, un malade qu’on ne suit pas, si c’est un paysan, il peut carrément perdre sa saison, sa saison de culture parce que vous imaginez, l’hivernage c’est trois mois, bon pour quelqu’un qui n’a pas pu semer pendant une semaine, les semis ne dépassent pas généralement les une semaine, ou au maximum 10 jours et la culture également prend également un mois et demi. Alors donc vous voyez déjà pour quelqu’un qui n’est pas suivi et qui prend trois semaines, sinon 4 bonnes semaines déjà, il n’ a pas semé donc si il n’a pas semé, qu’est ce qu’il va cultiver ? Donc si il n’a pas pu semé, cela veut dire qu’il n’a pas de champ pour cultiver alors donc au moment ou les gens cultivent, lui il n’a pas de champ à cultiver, il est obligé de faire autre chose et voilà maintenant en fin d’année, pendant que les gens récoltent, il n’a rien et voilà c’est ce qui explique un peu vraiment l’effet de la maladie et qui amène, qui appauvrit la population. Studio On ne meurt pas du vers de Guinée : Malgré les 16 mille cas de personnes encore affectées chaque année au Mali, surtout dans le nord aux alentours de Kidal et de Tombouctou, il n’y a pas de décès dus au ver de Guinée. Comme l’explique Issa Degoga, coordinateur du programme National de lutte contre la Dracunculose, la gravité de la maladie réside ailleurs : Degoga L’importance de la maladie relève dans l’action de l’influence sur l’agriculture et sur l’école. Dans nos zones, elle survient pendant l’hivernage. L’hivernage c’est le moment ou le paysan a besoin de sa force pour produire et c’est quand l’hivernage passe que le mal guérit si bien que il n’aura pas cultivé, il va pas récolter. D'ailleurs c’est pourquoi dans ces zones on l’appelle maladie du grenier vide, ça veut dire que quand il cultive pas, c’est vide ! Et ça c’est au niveau des paysans et c’est pourquoi les paysans en ont horreur de cette maladie . Et quand on parle de la maladie, ils ont vraiment peur parce que il y a des familles entières invalides pendant l’hivernage. Donc voyez vous le déshonneur de la famille et dans cette zone également, les élèves peuvent pas aller à l’école parce qu c’est un mal qui le plus souvent, apparaît aux pieds et empêche la personne de marcher. Diakité Dans la région de Mopti ou nous allons effectuer un déplacement, est ce que vous pouvez nous parler du cas spécifique de cette région et surtout de Bandiagara qui est une zone un peu cible. Degoga Ah oui Mopti, vous savez, au moment de l’enquête de 92 comme tantôt je le disais, Mopti à elle seule avait 9000 cas par an. Et cela veut dire que dans la zone il y avait 9000 personnes chaque année à l’hivernage qui étaient invalides et qui ne peut pas produire. Et comme c’est une zone agropastorale, cela implique des pertes, un manque à gagner énorme et Bandiagara également ... Bandiagara c’est la zone ... Vous savez à Bandiagara les gens prennent l’eau dans les rochers, il n’ avait pas de puits donc c’est là que la maladie a eu de l’importance parce que n’oubliez pas que le mal du ver de Guinée est systématiquement lié à l’eau de boisson. Donc celui qui n’avait pas de puits buvait l’eau des rochers. A Bandiagara, il y a certains villages comme Ningari par exemple, il y avait 1000 cas de ver de Guinée à Ningari en 92 et il y a des familles entières qui ne pouvait pas faire même un pas hors du village pendant l’hivernage et cela a attiré l’attention : ça a été une grande mobilisation sociale à ce niveau là et après trois ans, on a des forages avec les japonais et aujourd’hui la maladie a disparu à Ningari : il n’y même pas un cas aujourd’hui à Ningari et les villageois ont retrouvé leurs forces. La production a recommencé mais malheureusement les pluies manquent présentement. Diakité Comment les populations ont accueilli le programme et est ce que les activités ont repris de plus belle et est ce que on a senti un certain impact positif cette fois ci, sur l’agriculture ? Degoga Ah oui, absolument, absolument ! Imaginez que nous avions fait un calcul de pertes économiques causées par le ver de Guinée par absence de travail eh bien c’était considérable ! Si vous vous amusez à calculer un peu les absences de travail de 16 000 personnes en hivernage et vous convertissez ça en monnaie, vous allez voir ce que ça donne comme pertes... Et puis il y a aussi l’apport des points d’eau : c’est un soulagement important. A cause du ver de Guinée, les gens ont eu des points d’eau, des forages et là, c’est un soulagement important. D’abord les femmes, le temps de travail, elle va chercher l’eau très loin, c’est fini parce que le forage est fait dans le village. C’est eau potable et ils ont de l’eau à coté du village. Donc tout ça a fait que les gens sont extrêmement satisfaits de ce que le programme ver de Guinée dans le coin de ces villages. Parce que c’est une maladie qui n’est pas immunisante, c’est le plus important : ce n’est pas parce que je suis guérie de la maladie aujourd’hui, que l’an prochain je ne la ferai pas. Chaque année on peut la faire et d’ailleurs à Bandiagara, à Ningari dont je parlais tantôt, il y avait une dame, chaque année elle faisait le ver de Guinée. Une fois elle a eu jusqu’à 50 vers dans son corps. C’est pour dire que l’absence de la maladie aujourd’hui dans une localité sans eau potable ne garantit pas qu’elle ne vienne pas encore. Studio La bataille n’est donc pas forcément gagnée une bonne fois pour toutes, car si on guérit une fois, on peut être ré-infecté chaque année au moment de l’hivernage, si on n’est pas vigilant. Mais dans la région de Mopti, la sensibilisation faite par les autorités a porté ses fruits et Mariam Yalkouyé est agricultrice dans la région de Ningari. Elle a souffert de la dracunculose mais elle est maintenant guérie. Interview en langue Traduction Le ver de Guinée arrivait chez nous, surtout à l’approche de l’hivernage que le ver de Guinée arrivait chez nous .... On ne connaît pas d’où ça venait le ver de Guinée. Je ne sais pas comment j’ai attrapé le ver de Guinée, j’ai vu enfler mes pieds seulement. Je ne sais comment il m’a trouvé. Bon pendant la saison sèche, je faisais des petits commerces, pendant l’hivernage je cultivais, Dés que le ver de Guinée m’a attrapé, le commerce je n’ai pas pu faire et la culture aussi ...ça m’a empêché de faire la culture. J'étais couchée plus de trois mois, sans rien faire. Bon dés que on nous a sensibilisé de boire l’eau en filtrant, d’es qu’on a commencé à faire ça, vraiment ça va. Toute femme, chaque famille, ils n’ont qu’à payer des tamis pour filtrer l’eau.
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